Numéro 20 : Mélanie Helena VERTIGO .

Cette nuit, j'ai fait un rêve....Mais vraiment un rêve MERVEILLEUX, c'était indescriptible... Je ne

sais comment expliquer ce que j'ai ressenti... Connaissez-vous cette sensation si étrange, si terrible,

qui fait que vous regrettez presque d'être en vie car vous vous êtes réveillé ? Ce remord, même si

vous savez que ce n'est pas de votre faute, qui surgit quand vous vous rendez compte que tout ceci

n'était qu'un rêve, enfin... ? Parfois, on préférerait ne pas s'être réveillée, rien que pour voir la suite,

quand à un moment des plus cruciaux, soudainement, tout disparaît et que vous ouvrez les yeux sur

une chambre... Dieu que c'est horrible ! Je voudrais tant voir la suite, j'aurai voulu ne jamais me

réveiller, dormir encore, m'endormir pour toujours, je donnerai tout ce que j'ai contre cela, pour

vivre la suite... Comme j'aurai voulu voir cette suite, comme j'aurai voulu... Un rêve, c'est le cas de

le dire ! Je veux bien plonger de suite dans le sommeil éternel pourvu que je continue à exister dans

cette histoire, cette histoire si merveilleuse... Ou alors, que soit fait quelque chose pour que chaque

nuit, il puisse se prolonger, reprendre là où je l'ai laissé, et que les événements continuent, un

« épisode » par jour, comme une bonne série télé, un chapitre de livre... Il ne m'arrivera

certainement jamais ce que j'ai rêvé qu'on m'annonçait, certainement jamais, oui, même si c'est

cependant une chose possible... Plausible ? Oui, pour les autres, pour certaines personnes, mais pas

pour moi ! Ma vie n'est pas assez belle pour cela, je n'ai pas assez de chance, je n'y crois pas... Non,

voyons, ce n'est pas possible, c'est bien trop gros ! Je dois faire l'impasse, oublier, arrêter d'y

penser... Consulter mon dictionnaire des rêves pourrait peut-être aussi être amusant, qui sait ? Et

puis, dans le doute, quand même, je ne vous le raconterai pas de façon directe, claire et précise, de

vive voix dans la réalité, en tout cas !! Voilà ! De toute façon, j'ai toujours préféré m'exprimer par

écrit !

Je vais donc vous raconter l'histoire incroyable qui a bouleversé ma vie il y a quelques mois,

puisque tel était mon but lorsque je me suis mise devant mon ordinateur pour écrire ce matin...

Je subis les pires choses, je vis l'enfer, mais personne ne veut me croire ! Heureusement que j'ai tout

de même un univers pour me réfugier, ça sert bien... !

C'est ce matin-là, en plein hiver, lorsque j'appris sur les sites Internet et les forums de discussion,

que, feu mon idole si peu ordinaire avec qui je correspondais parfois sur Facebook, reposait en paix

depuis cette nuit, que mon rêve périodique, un peu ridicule, je l'avoue, se réalisa : celui de posséder

une caméra ! Une caméra pour filmer tout, et montrer les preuves de ce que je vis, le meilleur

comme le pire, pour qu'on me croit enfin !! Je m'imaginais déjà avec tout ça autour du cou, me la

jouer Claude Lelouche ou Tim Burton, trop drôle !!! Sauf que...Là n'était pas le principe de cela,

car, contre toute attente, pauvre petite anonyme que je suis, pourtant jamais que virtuelle pour lui,

de plus, Monsieur n'avait fait autre que de me céder sa place ! Sa série de vingts photos, basées sur

les personnages étranges, n'étaient pas tout à fait terminée... Il s'en serait fallu de peu, car, en

effet...Il ne manquait que la vingtième !!! Mais tout de même, elle avait autant d'importance que les

autres, et il fallait bien la faire, ne pas décevoir les fans, ou du moins, les réconforter de leur

chagrin... Et comme en guise de fan, j'étais bien dans les premiers de la classe, qui que je sois, il

était tout à fait logique, du point de vue rationnel, sans aucune autre considération, que j'écope de la

mission ! Je n'avais donc jamais « que cela », un seul impératif, et après, il me fallait simplement

suivre l'actualité, attendre d'éventuelles sollicitations... Si peu ?? Mais quel dommage !!! Enfin, j'ai

toujours cela pour moi...

C'est ainsi que je dus annoncer la nouvelle à mes parents, afin que nous nous dirigions

premièrement vers l'appartement pour récupérer le matériel ! Une fois cela fait, il n'était que huit

heures du matin, et le jour à peine levée, j'appris une bonne nouvelle pour tout adolescent qui se

respecte : aujourd'hui, c'était école buissonnière !

En effet, la date du rendez-vous était justement, comme par hasard, fixée ce jour-là, le 21 janvier

2013, petite malice l'artiste qui avait décidé de garder un point de motivation un mois après la soidisant

supposée et si médiatisée fin du monde ! C'est seule, donc aussi à pieds, et uniquement munie

de mon tout nouveau matériel que je savais à peine utiliser, que je devais me rendre à l'adresse

suivante :

Melle VERTIGO Mélanie Helena

13 rue de Grâce

12 121 Val-Sans-Souci

Je commençais alors le chemin dans le petit matin frileux, pas de philosophie, de littérature ou

d'histoire-géographie pour moi ce matin, mais déjà de la marche pour commencer ! Remarquez, que

demander de plus pour une littéraire si lasse de sa filière ?

J'aimais mon aventure, je l'avoue !

Tout le temps du trajet, je marchais et suivais les directions machinalement, j'étais totalement

ailleurs... En vérité, je revoyais mon rêve... Cette situation, où tout était beau... Je me souvenais,

presque comme si c'était réel, de cette mystérieuse obligation d'aller ce jour dans cette ville où se

trouvait l'école que je souhaitais tant intégrer l'année prochaine... Je revoyais ensuite ce passage

délirant digne d'un film fantastique, se substituant aux mystérieuses choses prévues une fois arrivée

à la ville, ainsi que mon reflet dans le miroir, où je croyais voir un de mes personnages préférés, et

non celle que je suis et déplore parfois tant... Passant du coq à l'âne, comme cela se fait si bien dans

les rêves, je savais que j'avais reçu un email fabuleux m'annonçant ma nouvelle : J'ALLAIS LA

REVOIR !!!! Mon amie, j'allais la revoir !!! En ces termes, elle me proposait « de me voir pendant

ces quelques jours »... Je me revois arriver chez elle, je la revois souriante, dans le hall d'entrée,

dans le salon et dans la cuisine ensoleillés et lumineux... Heureuses de se retrouver, moment

magnifique, unique, tout en légèreté et pourtant si puissant... Et j'ai appris la nouvelle : le

séjour !!!!!! Oui, un séjour, chez elle !!!! Plusieurs jours, plusieurs nuits, rendez-vous compte ???

Etre avec elle, plusieurs jours !!! MAIS JE REVE !! Oui, c'est vrai, je rêve de toute façon, au sens

propre du terme ! Je me vois retourner chez moi pour prendre mes affaires et faire mes bagages, je

me vois passant dans le couloir, je me souviens que dans le miroir, j'étais vêtue de rouge et de gris,

et qu'il y avait toujours tant de soleil... J'aperçois ma mère au téléphone avec elle, et je cours dans

l'excitation... OH NON !! Je me suis éveillée... Pourquoi ça, pourquoi ?? J'aurai préféré mourir, que

cela... Pourquoi faut-il ? Tout était si beau, si parfait, si facile, si étrange, certes, mais paraissant en

même temps si simple et normale... ça coulait...ça m'a coulé entre les mains... Je donnerai tout,

j'aurai donné tout, jusqu'à ma vie, pour le revivre, pour le finir, ou l'avoir au moins vécu en entier, si

tant est que ce soit possible... Je n'avais jamais été aussi triste, jamais eu aussi mal, en dehors

comme en dedans, que lorsque je réalisai mon réveil ce matin-là... C'était atroce...

Je me vois encore, quand après des heures qui me parurent à la fois courtes et interminables,

j'arrivais, même pas fatiguée cependant, devant une sorte de château-maison si étrange, petit

merveille d'architecture bizarre à la fois inquiétante et coloré, semblant tout droit sortie d'une oeuvre

de Tim Burton ! Revivre mon si doux songe m'avait aidée, encouragée, fait passer le chemin plus

vite, oublier tout hâte, tout appréhension, etc... !

J'avançais timidement dans la grande allée qui serpentait le jardin, entre les fantasques sculptures

végétales , sous la lumière si étrange, presque artificielle, toujours digne d'un fim gothique … Mon

coeur battait la chamade devant la grande porte violette pailletée sur laquelle reposait une loquet

noir en forme de tête de mort... Je le fis claquer doucement... Personne ! Je recommençais plus fort !

Sous mes yeux si surpris, un valet d'un autre temps vint m'ouvrir, et en silence, à la suite de

multiples couloirs sombres, étroits et sinueux, il me conduisait dans une drôle de chambre des plus

originales... Un vrai bazar où toute sortes de bibelots plus étranges les uns que les autres

s'amoncelaient partout, en gros, l'image populaire d'une sorte de caverne d'Ali Baba... Par contre, il

y régnait une atmosphère ensoleillée, chaude, lumineuse, estivale et légère... Au centre, sur une

couche de satin rose et blanche, une jeune femme très intrigante... Semi-allongée, semi-assise

parmi, posés autour d'elle, un amas de prestigieux livres anciens et des assiettes d'or aux couverts

d'argent contenant les mets les plus raffinés, des fruits et toutes sortes de gâteaux colorés, là aussi,

toujours dignes d'un film fantastique, elle était figée, dans une position lascive mais immobile,

regardant droit devant elle, les yeux fixes, elle semblait tout simplement poser... Elle était d'un

charme très particulier avec son visage si spécial à l'expression indéfinissable... Elle me regardait de

ses grands yeux noirs comme la nuit, plantés au milieu d'un visage allongé au menton très pointu,

au front grand et large et aux hautes pommettes, paré d'une bouche carmine de femme fatale

contrastant avec son teint aussi blanc que la neige, presque d'une pâleur quasi mortelle... Ses traits

étaient couronnés d'une épaisse crinière bouclée de sienne brûlée qui descendait jusqu'à la taille de

son corps si frêle, vêtu de tissus chamarrés et de dentelles précieuses...

Machinalement, ne sachant que faire, j'appuyais sur le bouton « On » et tentais d'ajuster le plan et la

mise au point... Les yeux fixés sur l'objectif, je vis soudainement une larme silencieuse couler sur sa

joue au moment même où je pris le premier cliché... Pas grave, ça ajouterait à la photo, si j'ose

dire... !

- « Qui êtes-vous ? », demanda-t-elle, hésitante et d'une voix qui transpirait la tristesse...

Je ne savais que répondre !

Cette créature n'était autre que l'épouse du fabuleux artiste bien trop tôt disparu (Enfin, la dernière

en date!), vivant bizarrement dans une maison séparée de la sienne... Tout cela était peu connu,

seulement des magazines people les plus voyeuristes... Elle souffrait d'un étrange mal qui la

poussait à détruire tout ce qu'elle aimait...

Quand elle me regardait, quelque chose me fendait juste le coeur...

Je voulus tenter de l'aborder avec des choses plus ou moins légères, pas trop désagréables en tout

cas, et la conversation s'engagea rapidement...

- « Moi, vous savez, je suis encore une grande enfant, lui dis-je. Je suis une rêveuse, une artiste,

mais je voudrais changer de vie ! J'ai plein de passions, beaucoup de choses différentes

m'intéressent, je n'aime pas tout, mais presque, et mon univers d'art et de lettres magiques est mon

refuge... Mais plus tard, je voudrais devenir coiffeuse ! Une nuit, j'ai déjà rêvé de la ville de l'école

où je voudrais aller l'an prochain... Tu sais, quand je serai coiffeuse, j'aurai les cheveux aussi longs

que RoBERT, ma chanteuse préférée, et ils seront aussi bouclés comme ceux d'Helena Bonham

Carter, dorés comme ceux des héroïnes de mon idole, Mélanie Delon, et en haut, j'aurai plein de

tresses comme les femmes rastas ! Je teindrai ceux des autres de toutes les couleurs, et même les

gens laids, je les rendrai beaux ! Un jour, quand j'aurai les moyens,je quitterai la maison de mes

parents et je goûterai enfin à la liberté de voler de mes propres ailes ! J'aurai une maison que je

décorerai entièrement avec des figurines féeriques, et à mes heures perdues, je continuerai à écrire

des romans fantasy ! Je serai coiffeuse-écrivaine, ce sera trop marrant !! Peut-être même que j'irai

coiffer les gens chez eux, j'arriverai dans une voiture claire et dorée comme le sable, comme celle

de maman, et dans laquelle je mettrai toujours de la musique qui fait rêver : je ferai tourner

RoBERT, La Fille D'Octobre et Claire Diterzi en boucle quand je serai sur les routes ! Le week-end,

j'irai partout en France pour faire TOUS les salons du livre, je me promènerai avec des robes de

fées, des ailes, des rubans, des voiles, des paillettes et des dentelles, j'aurai l'air d'une star !

J'arriverai chez mon amie, et ça la fera sourire, j'en suis certaine... ! Et aussi, j'oubliais : j'apprendrai

à dessiner !! J'irai pendre des cours dans les écoles réputées de ma région, si je le peux, et qui sait si

je ne finirai pas par savoir, qui c'est, te reproduire telle que tu es dans mon carnet de croquis ? Ce

sera magique !! Peut-être même que les gens m'aimeraient enfin, ou du moins, quelques uns ? J'ai

tellement hâte ! »

Nous nous prîmes les mains...

- « Tu voudrais que nous restions en rapport ? « , murmurais-je...

C'est alors qu'un silence de mort s'abattit dans la pièce... Les larmes montèrent de nouveau à ses

yeux, ce qui fit monter les miennes aussi par la même occasion..

Elle me regarda encore avec cette expression qui me touchait tant...

- « Non, ce ne serait pas possible, plus maintenant, en tout cas... », soupira-t-elle, esquissant un

sourire entre ses larmes... Ses yeux brillaient comme des étoiles, deux étoiles noires...

- « Moi, je ne sais pas à quoi je ressemble ! », déclara-t-elle soudain étrangement, comme pour faire

diversion, changer de sujet, même si bien étrange diversion, je vous l'admets...

Je la regardais, l'étonnement et la stupéfaction se voyaient dans mes yeux...

- « Non, je ne me suis jamais vue, même pas entre-aperçue dans un miroir... ! »

- « Pourquoi ? »

- « Je ne sais pas... En tout cas, moi, je ne pourrai jamais être comme toi... Bah oui, tu sais bien, ce

que j'aime....Tu connais l'histoire ? »

- « Oui, oui, évidemment, bien sûr... Ce doit être dur...

En tout cas, moi, je te trouve magnifique ! Tu ressembles aux héroïnes de fantasy, on dirait une

photo d'art, comme celle des livres et des expositions, je te jure ! »

Elle semblait étrange, incrédule...

Je lui tendis alors mon petit miroir de poche...Et c'est là que le drame se produisit... Quand elle vit

son reflet, un sourire se dessina d'abord sur son visage, accompagné d'une satisfaction qui fit briller

ses yeux et resplendir son être tout entier... Cela dura quelques minutes, puis rapidement,

paradoxalement, comme si elle avait perdu la raison, elle porta ses mains à son visage et se mit à le

serrer entre celles-ci avec une violence extrême, comme si elle voulait l'écraser, alors qu'un terrible

état d'agitation s'empara de son être... En moins de temps qu'il ne le faut pour le dire, je vis sa peau

se fissurer, puis se fendre comme de la porcelaine... D'abord, ses si beaux traits s'effacèrent, puis

elle tomba tout entière à mes pieds, en miettes... Il ne restait plus qu'un tas de morceaux de

porcelaine brisée, rien, à première vue, ayant pu connaître la vie un jour... Totalement désemparée,

je ramassai et mis tous les morceaux dans mon sac, puis rentrai chez moi en pleurant... Elle resterait

toujours près de moi...

Je pris la décision, le soir même, de la mettre dans un petit cercueil en carton ayant servi

d'emballage à une poupée gothique de collection, puis d'enterrer le tout dans le coin le plus proche

de ma chambre du jardin de mon père... En secret, personne ne sut et ne saura jamais rien...

Ma routine reprit, les jours et les mois passèrent... Je devais cacher au mieux mon bouleversement,

car une telle aventure ne laisse jamais intacte, je peux vous le dire !

Cependant, depuis quelques temps, je suis inquiète... Il se passe de drôles d'événements... Parfois, la

nuit, je suis réveillée en sursaut par l'aperçu d'une pâle lueur bleutée, et dans dans les couloirs et les

escaliers, il me semble voir déambuler une ombre féminine à l'allure si étrange, proche de celle de

mes chanteuses préférées, dans le mystère, la magie, la fantasy, etc...Mais tout est si flou, et même

si l'angoisse me prend souvent, je repars au pays des rêves... Par contre, je me demande bien ce qu'il

m'arrive : cela fait déjà cinq fois que je lâche ma figurine préférée, qui par bonheur, n'est toujours

pas cassée, mais je ne peux m'en approcher et la toucher sans frôler le dégât... Je suis vraiment

inquiète... ! Dieu soit loué que je n'aime ni ma vie, ni mon être, et si peu de personnes, c'est là que le

négatif devient enfin un point positif, pour une fois, si vous voyez ce que je veux dire... ! Promis, je

ferai toujours mon possible pour me maîtriser, soyez-en sûrs, je le jure ! Tout ira bien, restez

calmes...

Oh, je dois vous laisser, j'ai du courrier !!!

Ce n'est pas vrai ??? J'AI UNE NOUVELLE SOLLICITATION !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Depuis que j'attendais... ça va me changer les idées !!! Et puis, ça me fera connaître, comme on dit,

n'est-ce pas ?

Hada